dimanche 29 mai 2005
Il est clair qu’aujourd’hui lorsque l’on dit le mot libre, beaucoup entendent le mot gratuité et cette notion semble avoir parasité le discours au point de s’être imposée comme la différence essentielle entre le libre et le non-libre, qu’il s’agisse de la musique ou des logiciels. Pourtant, la gratuité n’est pas de fait l’apanage de tous les acteurs du mouvement du libre.
Si certains musiciens ont choisi des licences telles que Art Libre autorisant la copie, la modification et la diffusion de l’œuvre (jusqu’à la vente) sans obligation de reverser quoi que ce soit à l’artiste, beaucoup préfèrent garder la main mise sur la commercialisation de leurs titres. Comment pourrait-on leur en vouloir ?
Le libre téléchargement des musiques copyleft ne porte pas en soi l’utopie d’une gratuité qui ferait vivre, malgré tout et par magie, les artistes.
Il procède d’au moins deux lignes directrices.
La première, humaniste, s’entrevoit comme la possibilité d’offrir au monde le fruit de son travail, dans un désir réel de partage et de rencontre.
L’autre, sans contradiction, permet la diffusion, la connaissance d’œuvres qui, sans l’internet et la pratique qu’en font les artistes copyleft, auraient plus de difficulté à trouver des auditeurs.
Le web devient, à peu de frais, une immense vitrine promotionnelle et les musiciens auraient bien tort de s’en priver.
Les musiciens libres n’ont donc pas forcément moins d’ambition à être rémunérés pour leur travail que les artistes aliénés à la Sacem.
Les concerts demeurent payants, les CDs sont vendus, même si tout est fait pour réduire au maximum les coûts de production, même si tout est fait pour que l’artiste soit le plus large bénéficiaire des bénéfices perçus.
Il s’agit avant tout de s’opposer vigoureusement à une industrie du disque qui -d’un bout à l’autre de la chaîne- s’engraisse sur le dos des musiciens.
Savez-vous que la Sacem perçoit seulement 0,07% des 90 cents que vous coûte un titre téléchargé depuis une plateforme payante ?
Savez-vous que la Sacem est en procès avec Universal qui ne reverse pas aux artistes les droits sur leurs titres mis à la vente sur internet ?
Mais tous les artistes ne sont pas perdants.
Savez-vous que « les enfoirés », s’ils ne sont pas rémunérés en tant qu’interprètes, touchent tous les droits sur les chansons dont ils sont auteurs ?
Pour être sûrs de donner aux Restos du cœur, faites leur plutôt un chèque...
La gratuité reste donc une notion à analyser de près.
Le copyleft replace l’œuvre au centre de la relation public-artiste et il en va de la responsabilité de chacun de faire vivre ce mouvement.
Au terme de gratuité, il paraît dès lors plus judicieux de substituer le terme de « gratitude » que bituur esztreym évoquait lors d’une entrevue sur la radio-web DBC.
Ce don d’art qui échoit aux musiciens l’est pour tous, en et hors la cité.
La musique libre, musique citoyenne et résistante, porte, dans ce monde où profit rime avec chaos, les espoirs réalistes d’une société plus équitable.
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Myriam